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NOTICE HISTORIQUE

Sur L’église

NOTRE DAME DE CHAUNY

ET COMPTE-RENDU

  DE LA PAROISSE

DEPUIS LA REVOLUTION JUSQU ’A NOS JOURS.

Par l’abbé CARON, vicaire de Notre-Dame et curé desservant

  d’Autreville.

 

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 PREFACE

Ce petit livre se divise en deux parties. Dans la première nous donnons, sous le titre de Notice historique, les notes les plus intéressantes que nous avons recueillies en collationnant les archives de Notre-Dame de Chauny.

Elles témoigneront avec évidence de l’origine illustre et de l’ancienneté de l’église paroissiale Notre-Dame. Dans la seconde, nous rappellerons, pour l’édification commune, tout le bien qui s’est fait dans la paroisse depuis un demi-siècle.

Si nous nous sommes plu à raconter les fastes de Notre-Dame, personne ne s’en étonnera : nous aimons cet antique autel qui a réjoui notre jeunesse, ce sanctuaire où nous avons fait notre première communion, cette église vénérable qu’il nous a été donné, par une faveur insigne, de desservir aussitôt notre retour de la Ville Eternelle. Du reste, nous avons cru répondre au désir de Monseigneur l’évêque de Soissons, dont voici l’ordonnance :

« Nous prions MM. les curés dont nous visiterons les Paroisses, de préparer, afin de nous le présenter, un état sur lequel seront très-soigneusement inscrits tous les détails suivants :

1° Noms des fondateurs, date de la donation entre vifs ou du testament ;

2° Objet de la donation ou du legs (si c’est un immeuble, on en marquera le revenu annuel) ;

3° Date de l’Ordonnance ou décret qui a autorisé l’acceptation de la libéralité, date de l’ordonnance épiscopale qui a régularisé la fondation ;

4° Charges et services religieux stipulés par le bienfaiteur. »

 Nous espérons compléter, dans la suite, notre travail et relater les traits édifiants, les belle cérémonies, les heureux fruits des Retraites et Stations quadragésimales, les visites épiscopales, qui ont tant de fois consolé l’église Notre-Dame, depuis sa réouverture jusqu’à ce jour.

  Jules CARON

Vicaire de Notre-Dame, et curé desservent d’Autreville.

Chauny, le 1er juin 1868.

   

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NOTICE HISTORIQUE

SUR L’EGLISE NOTRE-DAME DE CHAUNY

ET

COMPTE-RENDU DE LA PAROISSE

DEPUIS LA REVOLUTION JUSQU ’A NOS JOURS.

 

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I

 

VIE DE SAINT MOMBLE

  PATRON SECONDAIRE DE L’EGLISE NOTRE-DAME

 

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Saint Momble était Irlandais. Il descendit en France à la suite de saint Furcy, avec saint Gobain et une pléiade d’apôtres venus, comme lui, de l’Ile des Saints.

Il se retira d’abord au monastère de Lagny-sur-Marne (à six lieues de paris) dont il fut abbé. Saint Eloy l’y vint chercher et l’envoya travailler au salut des âmes dans son vaste diocèse. Saint Momble se fixa à Condren, près Chauny.

Il allait de là évangéliser les pays d’alentour. Ses ardentes prédications, sa vie austère, ses miracles de zèle apostolique triomphèrent des cœurs les plus durs.

Il mourut vers la fin du VII° siècle. Son corps fut déposé avec honneur en son oratoire ; et dans la suite on le transporta à l’Eglise N.-D. de Chauny.

Les calvinistes, maîtres de la ville en 1567, profanèrent les saintes reliques et l’on ne put sauver que le chef vénérable de Saint Momble, que l’on croit conserver encore dans le trésor de l’Eglise N.-D.

La fête de Saint Momble tombe le 18 novembre. Elle se trouve mentionnée au Propre de Soissons sous cette rubrique : Festum S. Momboli, Confess.

Saint Momble est le patron de Chauny (1) et l’on appelle vulgairement la foire de cette ville la Saint Momble (2). Cette dénomination, assurément fort ancienne, vient de ce qu’autrefois les pèlerins venaient ce jour là, vénérer en foule, les reliques de Saint Momble à Notre-Dame. Il se fait encore aujourd’hui, à cette époque de l’année, un grand concours de peuple. 

(1) La ville de Chauny (Aisne), compte 8891 habitants. Elle est située au cœur même d’un riche vallon qu’arrosent l’Oise et le canal de Saint-Quentin. La contrée porte le nom de Vallée d’or ; le distique suivant en chante et la fertilité et les produits divers :«  Calnia dulce solum, cui septem commoda vitae, Poma nemus, segetes, linum, pecus, herba racemus. »

(2) Cette foire, l’une des plus belles des environs, commence le 29 août et dure huit jours. Elle est chaque année l’occasion de fêtes splendides.

   

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II

 

NOTICE HISTORIQUE SUR LA PAROISSE N.-D.

 

La paroisse Notre-Dame fut fondée, dit-on, par Saint Momble lui-même sous le vocable de la mère de Dieu. Erigée en Collégiale (1) au X° siècle, lors de la translation des reliques de son illustre fondateur, elle eût son chapitre. Un siècle plus tard, les chanoines réguliers de Saint-Nicolas, à la prière des comtes de Vermandois, s’établirent à Chauny, et l’on ouvrit pour eux, en l’Eglise Notre-Dame, une chapelle latérale dédiée à leur saint patron (2). Ils chantèrent là, pendant plus de cent ans l’office divin et, disent les anciennes chroniques, les chanoines de la collégiale Notre-Dame étaient si édifiés de leur grande piété qu’ils entrèrent dans leur congrégation (3).

La chapelle Saint-Nicolas passa à la confrérie des mariniers ; l’Eglise devint conventuelle, le curé prieur (4). Le modeste couvent, désormais trop petit, fut abandonné peu après et la communauté se retira à Saint-Eloi-Fontaine. Il ne resta à N.-D. que le Prieur-Curé (5) et quelques religieux pour le service de l’église paroissiale et des deux chapelles du Brouage et de Senicourt.

Ce nouvel état de choses dura jusqu’à l’érection de l’église Saint-Martin (du Brouage), en succursale, au XV° siècle (6). Il y eut alors dans Chauny, deux paroisses distinctes. Cependant, comme marque de soumission à l’église-mère (7) le clergé de Saint-Martin était obligé d’y venir chaque année aux processions de la Fête-Dieu et aux Te Deum. Cette clause lui semblait bien dure, à ce qu’il paraît, car nous voyons dans les archives de l’église Notre-Dame des procès et autres documents fort curieux à ce sujet (8). On allait, pour se soustraire à cette obligation jusqu’à nier l’existence de la paroisse N.-D. que l’on persistait à désigner sous le nom de « Paroisse Saint Nicolas au prieuré Notre-Dame », et cela parce que la chapelle du glorieux évêque de Myre y était en grande vénération. On tenta bien au XVII° et au XVIII° siècle de changer le titre primordial de curé de Notre-Dame en celui de Saint-Nicolas. Un sieur Demay, vicaire-général de l’abbé de Saint-Eloy-Fontaine, Monseigneur d’Uzès, ayant désigné le père de la Vallée à la cure de Saint-Nicolas, les paroissiens refusèrent de le recevoir disant que, « la cure et paroisse avoient la qualité de cure et paroisse Notre-Dame (9).» Un essai du même genre avait eu lieu quelques années auparavant en la personne d’un nommé Philippon (10). Mais ces intrigues furent toutes les fois déjouées. Et pourtant ce fut toujours sur ce titre de Saint-Nicolas que les ennemis de Notre-Dame appuyèrent leurs prétentions (11). Cette obstination causa ces profondes divisions qui désolèrent l’église de saint Momble et finirent par l’entraîner à  sa ruine (12)

En effet, l’Assemblée Nationale rendit sa Constitution civile du Clergé : or l’article 15 portait que dans les villes et bourgs au-dessous de 6000 âmes, il n’y aurait désormais qu’une seule paroisse. « En suivant l’esprit et les dispositions du décret, le choix de la paroisse à conserver dans la ville de Chauny devait tomber sur Notre-Dame qui, de temps immémorial, jouissait des droits de primauté, des honneurs et prééminences attachées aux églises principales (13). »

Néanmoins l’église Notre-Dame fut supprimée et la paroisse annexée à celle de St-Martin.    

C’en était fait, la Révolution avait affranchi cette dernière de ses prétendues servitudes et réalisé ses aspirations séculaires : St-Martin fut nommé seul temple national de Chauny, et l’antique collégiale, en dépit de son passé, réduite à servir de magasin à fourrages et à sel.

Rendue au culte en 1803, l’église Notre-Dame reçut le titre de Chapelle de Secours (14). Elle conserva cette humble destination jusqu’en 1816 où, par suite de je ne sais quelles difficultés, elle fut de nouveau interdite (15). Enfin plusieurs années après, on fit droit aux réclamations incessantes des paroissiens de N.-D. et la pauvre église de Saint-Momble fut ré-ouverte puis érigée en succursale par une ordonnance royale du 14 décembre 1828. M. Bonjean et les vicaires de Chauny la desservirent jusqu’à l’arrivée du nouveau et premier curé de N.-D. depuis la Révolution (1840).

A partir de cette époque commença la renaissance de la paroisse Notre-Dame.

La paroisse Notre-Dame compte environ cinq mille âmes. Elle comprend le quartier du Pont-Royal, ou Basse-Ville, autrefois appelé l’Ile-du-Pont-Royal (les Boucheries et la rue Neuve-Sainte-Eugénie forment les limites des deux paroisses), le petit et le grand Bailly, les grands et petits Navoirs, la rue de la Chaussée, qui s’étend jusqu’au pont Saint-Lazare, où se trouvaient anciennement les Moulins de la paroisse Notre-Dame de Chauny. 

(1) On appelle collégiale une église qui, sans être le siège d’un évêché, possède néanmoins un Chapitre de chanoines séculiers. Toutes les fois qu’au moyen âge on voulait qu’une église fut desservie avec dignité, si on ne la confiait pas à des religieux, on y établissait un Chapitre : on y fondait un  certain nombre de prébendes, c'est-à-dire qu’on lui donnait des revenus fixes qui répondissent à l’entretien des prêtres, diacres et sous-diacres, en nombre suffisant pour que l’office divin du jour et de la nuit y fût célébré tout entier, selon tout le cérémonial liturgique et la solennité convenable. Ces vues avaient bien certainement de l’élévation et de la noblesse ; elles concouraient notablement à donner de l’illustration aux lieux qui possédaient ces établissements.La collégiale la plus insigne qui ait existé dans l’étendue du diocèse actuel de Soissons et Laon, a été celle de Saint-Quentin. ( Ant.relig . de M. Lequeux, t.2, ch.20, n°4.). Claude Lafons (Histoire de Saint-Quentin) l’appelle « la Princesse entre toutes les Collégiales de France. »

(2) Ces religieux venaient du diocèse d’Arras et suivaient la règle de Saint-Augustin selon les constitutions de l’abbaye d’Arrouaise, près Bapaume. Ils avaient déjà les maisons de Saint-Crépin-en- Chaye et de Saint-Léger de Soissons. Cette congrégation, alors si florissante, dut au XVII° siècle, s’unir à celle de Sainte-Geneviève de Paris. C’est ce qui nous explique la présence de chanoines génovefains au Prieuré-cure de N.-D. de Chauny.

(3) Baudouin, premier abbé régulier du nouveau couvent, fut élevé, en l’an 1139, sur le siège épiscopal de Noyon. Philippe, comte de Flandre, qui posséda quelques temps le comté de Vermandois, en vertu de son mariage, avait, en 1183, donné à l’abbaye de Notre-Dame les moulins de Chauny. La même année, l’abbé donna en bail une propriété qu’il avait à Falaise, en s’assurant la prestation annuelle de trois mille harengs, preuve sensible de l’austérité de leur vie. (Antiq. relig. loc. cit. n°9)

(4) le pape Innocent II approuva par une bulle du 29 août 1139, les résolutions et changements du chapitre de l’église N.-D. Simon de Vermandois, évêque de Noyon, leur avait assuré, par une charte de 1135, la pleine et entière propriété des biens de la paroisse, altare de Calnei villa. Ce fut sans doute sur une de ces terres qu’ils bâtirent le fameux monastère de Saint-Eloi-Fontaine, au territoire de Commenchon, à deux lieues de Chauny. Les religieux de Saint-Eloi conservèrent toujours certains droits et privilèges sur Chauny et l’église Notre-Dame en particulier. Mais aucun document ne prouve, comme M. Melleville (Hist. De Chauny) l’affirme dans une simple note de quelques lignes et sans autorité que : « La paroisse de Saint-Nicolas fut instituée dans le moment même de ce changement. » Cet auteur ne semble pas se douter des grandes polémiques que souleva ce titre légendaire de Paroisse Saint-Nicolas.

(5) On sait que les curés de l’ordre de Saint-Augustin sont qualifiés Prieurs-Curés et leur bénéfice Prieuré-Cure : ce n’est qu’un seul et même titre. Les religieux de Saint-Eloi-Fontaine, contrairement à leur règle et sans doute dans le but de multiplier les dignités et revenus, commencèrent dès le XVI° siècle à vouloir séparer le Prieuré de la Cure. C’est à cette fin qu’ils inventèrent le titre de Paroisse Saint-Nicolas.

(6) Une église, sous le vocable de Saint-Martin, fut bâtie pour la première fois à Chauny, vers la fin du 12°siècle, dans le faubourg du Brouage ; mais sa situation hors des murs ayant amené plusieurs fois sa ruine, on résolut, au 16° siècle, de la transporter au lieu où elle se trouve aujourd’hui. On choisit à cet effet un emplacement situé près des remparts et de la rue de Noyon, et on en fit l’acquisition en 1563, moyennant la somme principale de 497 livres 10 sous. (Sem. Du Vermandois, t.II, p. 445. Melleville).  

(7) L’église s’appelait église primitive et les curés curez primitifs ou simplement prieurs.

(8) Les religieux de Sainte-Croix de Chauny, devaient également, par ordonnance épiscopale du 6 juillet 1668, assister à  ces processions générales. Le prieur du couvent avait place « après les sieurs curez de Notre-Dame et de Saint-Martin », les places du chœur devaient être réservées pour les religieux dudit couvent et cela par ordre de l’Ordinaire (du 23 mai 1676), ordre confirmé par l’official de Reims et par le Parlement, le 5 septembre 1678. Cet arrêt fut rendu en faveur « des religieux, prieur et chanoines réguliers de Sainte-Croix, et contre les curés, prestres habituez de Saint-Martin, » qui s’emparaient impunément, en ces occasions solennelles, des places des pauvres religieux de Sainte-Croix ! (Arch. De l’église N.-D. Mémoire impr.)

(9) Arch. de N.-D. Mémoire signifié « Pour les curé et marguilliers de la paroisse Notre-Dame de Chauny, Intimez - Contre Monsieur l’évêque d’Uzez, en qualité d’abbé de Saint-Eloy-Fontaine, appelant, - et contre J.B. Robert Demay, prieur conventuel de ladite abbaye, et soi-disant titulaire d’un prieuré simple establi en l’église Notre-Dame de Chauny, aussi appelant. » (Mem. Impr. En 1712)

(10) Ibid. loc. cit – Ils se firent pourvoir du titre de curé de N.-D.

(11) Le curé de Saint-Martin réclama, à ce titre, « la seconde place aux cérémonies et processions publiques dans le cas de l’assistance de l’abbé de Saint-Eloy-Fontaine. » (Arch. De N.-D. mém. imp. en 1709).

(12) Nous ne voulons pas rappeler de cruels souvenirs. Seulement pour donner une idée des usages de ces temps, voici un extrait d’un Mémoire manuscrit (Arch. De N.D.) – Tous les ans, suivant une coutume fort ancienne, le troisième jour des Rogations, le clergé de Saint-Martin venait se joindre à celui de N. D. près de la fontaine dite des Bons Enfants et ils allaient processionnellement, « celui de Notre-Dame à droite celui de St-Martin à gauche, » au village d’Ognes. «  Le curé de N.-D., comme étant premier curé, y disoit la messe. » Quand le mauvais temps ne permettait pas de sortir de la ville, on allait au couvent de Sainte-Croix où le curé de N.-D. chantait pareillement la messe. Le curé de Saint-Martin ne se rendait presque jamais à  cette procession, il  se contentait d’y envoyer son clergé. Il se dispensait également d’assister aux autres processions car nous voyons dans les archives plusieurs « sentences épiscopales » qui lui ordonnent « d’aller en personne aux processions du Saint-Sacrement faites en l’église N.-D. et de ne rien innover pour l’heure, l’ordre, le rang et la marche d’icelles ». Ces sortes de cérémonies n’étaient pas toujours très édifiantes ; il y avait même quelque fois des troubles, des rixes, etc. On fut obligé d’y renoncer dans l’intérêt du bien général. Fort heureusement de toutes ces mesquines rivalités, il ne reste plus guère aujourd’hui que le souvenir.

(13) Extr. d’une « pétition des Paroissiens de N.-D. à MM. les administrateurs du département de l’Aisne, à l’occasion de la circonscription des paroisses du lieu » (Arch. de N.-D.)

(14) On adressa à cette époque une pétition à « MM. les Présidents et administrateurs du district de Chauny » dans le but d’obtenir la réouverture de l’église N.-D. Nous sommes heureux de pouvoir citer les noms des signataires de cette pétition : MM. Alléaume, Bayeux, Boulanger, Bidez, Brunette, Carlier, J.B. et Nicolas Caura, Pierre et Momble Courboin, Dassonville, Debrie, Debruyère, Delanchy, Delavenne, Demussy, Demory de Neuflieux, Dru, Dubacq, Ducrocq, Denis Evrard, Fouquet, Gobert, Gogois, Goudement, Grenier, d’Harcourt, Huille père et fils, Lamy, Laude, Lecomte, Pierre Lepage, Magloire Leclère, Mignot, Morgny, Nital, Nutar, Paquier, Prud’homme, Quennevat, Quéquet père, Raincourt, Rondel, Soyer, Suret, Tailfer, Toupet et plusieurs autres notables dont nous n’avons pu lire la signature. (Arch. de N.-D.)

(15) Alors tous les ornements, vases sacrés, archives, etc., furent transportés à Saint-Martin par ordre de Mgr de Baulieu. Ce dépouillement de N.-D. fut l’occasion de scènes déplorables. (Arch. de N.-D.) 

 

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  III

 

BIENFAITEURS DE L’EGLISE

 

L’état affreux dans lequel se trouvait l’église Notre-Dame, au sortir de la crise révolutionnaire, fit naître dans tous les cœurs un zèle pour la maison de Dieu.

Mlle Tribalet (1) et la famille Demory de Neuflieux se montrèrent alors, entre tous, d’une générosité digne des plus grandes éloges. Une fondation pieuse fut faite par M. Demory en faveur de l’église N.-D. Mgr Jean Claude Le Blanc de Baulieu, évêque de Soissons, l’autorisa le 14 février 1806, et un décret de l’empereur, en date du 9 avril suivant, la rendit exécutoire.

I) Cette fondation porte : 1° que six saluts du T.-S. Sacrement seront chantés aux fêtes de la Conception,  de la Purification, de l’Annonciation, de l’Assomption, de la Nativité et en la fête de Saint-Momble ; 2° que six messes basses seront dites à certains jours de l’année. 

II) Mlle Hénin, par testament, fit à la paroisse N.-D. un legs de quarante francs, à charge « par ladite fabrique de la faire recommander tous les ans au prône, le dimanche qui suivra le jour de l’anniversaire de son décès, lequel est arrivé le 11 janvier 1842. » (Appr. Par Mgr de Simony, le 8 janvier 1847 ; par ordonnance royale du 2 avril suivant)

III) En 1857, une autre fondation pieuse beaucoup plus considérable, fut faite par Mme Mannier. Elle légua, par testament, une somme de dix mille francs, plus une autre somme de dix mille francs environ, provenant des biens quelle laissait. Cette donation, approuvée et réglée par ordonnance de Mgr de Garsignies, fut légalisée par un décret impérial du 25 décembre 1853.

Les charges sont : 1° de mettre, chaque année,  entre les mains de M. le curé, une somme de cent francs pour être employée, à son gré, en bonnes œuvres. 2° de faire dire, chaque semaine, une messe à l’intention de la donatrice et de la recommander chaque semaine au Prône.

A coté de ces fondations à perpétuité, nous devons mentionner avec reconnaissance, divers dons offerts à M. le curé pour l’embellissement de son église (2).

En 1854, deux médaillons en vitraux peints, représentant l’Ascension et l’Assomption donnés par Mme Beaumé.

En 1857, un calice en argent et une grande verrière représentant Saint Jacques de Compostelle, donnés par la Famille Constance.

L’inscription suivante est placée au bas de la verrière : «  Jacobo Constance, Ecclesiæ B. M. Calniacensis procuratori, patri, conjugique dilectissimo Coecilia Camberlin uxor, Leo atque Narcissus presbyter filii, Coecilia atque Ludovica, filiae, qualem pietas potuit, memoriam dedimus an. Dni 1857.  » « A la mémoire de jacques Constance, marguillier de l’église N.-D. de Chauny, père et époux tendrement aimé, nous Cécile Camberlin, son épouse, Léon et Narcisse prêtre, ses fils, Cécile et Louise, ses filles, nous avons, en l’année 1857, consacré ce souvenir tel que nous l’ont suggéré notre affection et notre piété ».

Nous regrettons beaucoup de ne pouvoir reproduire ici la lettre de condoléance et de remerciement que le Conseil de Fabrique adressa à la famille désolée. (Voir le registre des délibérations. Séance du 2 mars 1858).

En 1858 deux verrières représentant la Visitation de la Sainte-Vierge et l’Ascension de Notre-Seigneur, donnés par la famille Loiseau.

En 1859, une verrière représentant Sainte Françoise-Romaine, donnée par Mme veuve Laganne.

Trois autres grandes verrières représentant le Repas chez Simon, la rencontre de la Sainte-Vierge sur le chemin du calvaire et la Cène, furent données, en 1864, par Mlle Debruyère (3)

En 1866, un grand tableau représentant le martyr de saint Pierre, fut donné par l’Empereur.

En 1867, un autre grand tableau représentant le mariage de la Sainte-Vierge, fut donné par M. Bayeux. Cet artiste distingué en avait déjà donné deux autres : l’Assomption et l’Adoration des Mages.

Anonymes. - Un magnifique ostensoir, une statue de Saint-Joseph, un grand vitrail représentant l’Adoration des Mages, un calice en argent, quatre grands lustres, un calice en vermeil, une bannière de la Sainte-Vierge,  des tableaux, des ex-voto, etc.

1)Elle sauva deux fois la Châsse de saint Momble pendant la révolution et pendant l’invasion, en 1814. Par deux fois Mlle Tribalet rapporta en triomphe la précieuse relique, et le peuple et la ville toute entière reconnût et vénéra, comme par le passé, le chef vénérable de saint Momble. En 1844, M. le Curé ayant examiné la susdite châsse, ne trouva d’autre indication que cette légende placée sur la relique : « tête de Saint Momble » et pas d’authentique. Il soumit son doute à Mgr de Simony et la réponse fut qu’on devait cesser de l’exposer en public.

      (2)Le 13 octobre 1842, le conseil de fabrique permit de placer l’inscription suivante dans l’intérieur de l’église : « A la mémoire de J-P.–L. Cymon de Souville, mort directeur du Poli le 9 octobre 1810. Il a fait le bien pendant sa vie. Priez pour lui » Et Mme d’Eyssautier, née de Souville, en témoignage de reconnaissance, donna cent francs à l’église Notre-Dame.

(3)Il faut ajouter encore les lambris du sanctuaire dont Mlle Debruyère fit tous les frais et le presbytère qu’elle acheta et offrit à la ville de Chauny, contre une rente viagère.

 

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  IV

 

CONSEIL DE FABRIQUE

 

Le Conseil de Fabrique fut constitué légalement en 1828 aussitôt après l’érection de l’église N.-D. en succursale.

Mgr de Simony, par une ordonnance du 16 octobre 1829, nomma trois membres : MM. Leclère, Châtelain et Warnier. M. le Préfet, par un décret du 3 décembre suivant, nomma les deux autres membres : MM. Labart et Flavignon. M. Bonjean, curé-doyen, desservant N.-D. et M. Hébert, maire de Chauny, étant membres de droit.

Après avoir pris possession, selon les formes légales, de l’église N.-D. et des diverses pièces, titres... à elle appartenant, le Conseil de Fabrique ne donna plus signe de vie.

Aussi fut-il reconstitué une seconde fois en 1841, le 28 avril, - Mgr Simony nomma trois membres : MM. Dubacq, Mannier et Allongé ; M. le Préfet nomma: MM. Labart et Lacoeuilhe. MM. Fournaise, curé, et Hébert, maire, étant membre de droit.

Dès lors le Conseil de Fabrique tint régulièrement ses séances, et nous le voyons jusqu’à ce jour attentif et dévoué aux intérêts de l’église.

M. Labart, ayant donné sa démission, M. Courboin- Demilly, dans la séance du 2 mai 1842, fut élu pour le remplacer.

Le 14 avril 1844, M. de Courcy remplace M. Lacoeuilhe, démissionnaire.

Le 30 mars 1845, M. Dapremont remplace M. de Courcy, démissionnaire pour cause de changement de domicile.     

Le 11 juillet 1845 a lieu la nomination de M. Delorest, remplaçant M. Mannier, président, décédé. Dans la même séance, M. Dapremont est élu, à l’unanimité, président du Conseil  de Fabrique.

Le 8 octobre 1849, élection de M. Constance, remplaçant M. Allongé, décédé.

Le 20 février 1857, élection de M. Debrenne, remplaçant M. Dubacq, démissionnaire pour cause de changement de domicile.

L’église que le Conseil de Fabrique avait mission de patronner était dans le plus grand délabrement. Le plafond tombait en ruines, le carrelage et les murs étaient humides, dégradés, le clocher menaçait de s’écrouler...

On refit la voûte et le dallage (1), on établit un calorifère, les chapelles latérales furent transformées, l’orgue fut restauré de fond en comble, etc.

Le conseil municipal de la ville de Chauny approuva ces grands travaux d’embellissement. Il se chargea même presque exclusivement, sur la proposition de M. le Maire de la ville,  de l’érection d’un nouveau clocher (2). La Semaine du Vermandois l’annonça en ces termes, le 25 juin 1859, t.2 p. 503 :  « On parle aussi à Chauny d’un projet de prochaine construction de portail et de clocher pour l’église Notre-Dame de cette ville. L’église de Notre-Dame de Chauny est un édifice du 17éme siècle, bâti en pierre de taille et qui ne manque point d’une certaine majesté; le chœur en particulier est magnifique, richement pavé de marbre, et orné de fort belles boiseries (3). Assurément, cette église, outre l’intérêt qui s’attache à sa destination, mérite encore à beaucoup de titres l’attention des archéologues, et les sacrifices d’une administration municipale, aussi sage que généreuse, ne peuvent trouver une meilleure application »

1) Une pieuse personne de la paroisse, en mémoire de son fils unique, décédé, élève du séminaire de Soissons, fit renouveler le dallage de la chapelle de l’Archiconfrérie.

(2) l’église N.-D. possédait avant la Révolution quatre belles cloches. On ne lui a laissé que la plus petite des quatre. Ces cloches sortaient de la fonderie de Nicolas Seusse, à Noyon, qui s’était engagé « par-devant les sieurs curé et marguilliers » de les livrer « sonnantes, accordantes et parfaites au dire des experts musiciens et organistes sur le ton Fa Mi Ré Ut. » et pour la somme de « seize cens livres » (Arch. de N.-D. Extrait du reçu du sieur Seusse, daté du 13 décembre 1719).

(3) Nous avons découvert dans les archives de l’église, une pièce manuscrite où il est dit que « ces lambris ont été faits et construits aux dépens de la paroisse N.-D., en 1663, par Philippe de Théïs, marchand de bois à Chauny. »

 

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  V

 

CLERGE  DE L’EGLISE

 

Monseigneur de Simony nomma en 1840 seulement, le premier titulaire de l’église N.-D. de Chauny, M. l’abbé Fournaise. Après douze ans d’un pénible mais consolant ministère, M. le curé, en raison de ses fatigues passées et de l’accroissement exceptionnel de la paroisse, demanda un collaborateur (1),

M. de Garsignies érigea dons en en 1852 le vicariat de N.-D. Il y attacha le titre de curé desservant de Pierremande, petite paroisse du canton de Coucy, située à six kilom. de Chauny.

M. l’abbé Devant (Jules), fut le premier vicaire N.-D. Il resta quatre ans, de 1852 à 1856.

M. l’abbé Boucher (Onésime), remplaça M. Devant à N.D. et à Pierremande. Il resta trois ans, de 1856 à 1859.

De 1859 à 1861, M. l’abbé Legros (Arthur), vicaire, eut le titre de curé desservant d’Autreville, petite paroisse du canton de Chauny située à quatre kilom. de l’église Notre-Dame.

M. l’abbé Leredde (Alexis), remplaça M. Legros à N.-D. et à Autreville. Il resta de 1861 à 1864.

De 1864 à 1867, M. l’abbé Labbé (Adolphe), après avoir conservé le titre de curé-desservant d’Autreville pendant trois mois, fut exclusivement vicaire de N.-D.

Au mois d’août de l’année 1865, M. le curé demanda en faveur de M. l’abbé Caron (Jules), la cure d’Autreville vacante depuis plusieurs semaines. Il y eut dès lors deux vicaires résidants.

Sur ces entrefaites, l’Administration des Glaces fit élever, au milieu des ateliers, une chapelle de secours. Mgr Dours vint la bénir le samedi 21 octobre 1865 et la confia aux soins de M. le curé de N.-D.

En juillet 1867, M. l’abbé Hanoteaux (Eusèbe), remplaça M. Labbé au vicariat de N.-D. de Chauny.

(1) il y avait anciennement à Notre-Dame plusieurs vicaires et prêtres habitués. Ils chantaient chaque jour l’office canonial moyennant « la somme de huit livres pour deux mois » que les sieurs « Bussy, Courtois, Guillaume et Moinet, vicaires et prêtres habitués de ladite paroisse N.-D. confessent avoir reçue de Jean Pailette, grand marguillier de N.-D. » pour solde des mois de novembre et décembre de l’année 1682.

Cette modique rétribution ne leur était pas toujours servie fidèlement, aussi, une année (1740) « les sieurs Leleu et Magnier » se firent payer par le ministère du sieur Delaforge, huissier du baillage de Chauny ». L’ancien vicariat se trouve situé sur la place Notre-Dame en face de l’église, auprès de la petite rivière. On voit encore sur la façade de la maison divers emblèmes religieux et en particulier le monogramme du Christ.

 

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VI

 

CONFRERIES ET INDULGENCES

 

La première association pieuse établie en l’église N.-D. depuis sa réouverture définitive fut l’archiconfrérie de Notre-Dame des Victoires (1). Mgr Simony, sur la demande de M. le curé, en approuva l’érection canonique faite le 27 août 1844. Ainsi, après douze cents ans, Marie est de nouveau chargée de reconstituer selon son cœur saint et immaculé, la pauvre paroisse que saint Momble lui avait confiée autrefois. On vit bien les effets de la puissante protection de Notre-Dame. Les conversions se multiplièrent et les bonnes œuvres aussi.

Tout d’abord l’œuvre de la propagation de la foi fut créée. Les offrandes montent, chaque année depuis 1845, à cent francs environ (voire le compte-rendu diocésain de l’œuvre).

Nous citerons pour mémoire :

L’œuvre des Bibliothèques paroissiales, fondée en 1846 et qui fait circuler plus de cinq cents volumes.

L’œuvre de la Providence (1850). Les dames de l’œuvre portent à domicile des secours de toute nature aux malades indigents; le chiffre des aumônes s’élève, tous les ans, à près de mille francs.

La Société de Saint François Xavier fondée en 1855. (Voir le compte-rendu annuel de l’œuvre).

L’œuvre de la Sainte-Enfance (1857) et celle de l’Adoption (1858). Depuis l’arrivée des sœurs de Saint-Vincent-de-Paul dans la paroisse (1864), l’œuvre de la Sainte-Enfance a vu ses offrandes annuelles dépasser le chiffre de deux cents francs. (Voir le compte-rendu diocésain annuel).

L’œuvre du Denier de Saint Pierre (1865).

Saint Vincent-de-Paul passa quelque temps à Chauny en l’année 1650. Aussi l’on fêta beaucoup sa Béatification. Nous avons dans les archives une ordonnance de Mgr de Noyon qui ordonne « que le sieur de la Vallée, curé de N.-D., ira en procession à l’Hôtel-Dieu, pour la cérémonie de la Béatification du bienheureux Vincent-de-Paul.

L’œuvre de la Persévérance (1864). Le chœur de l’archiconfrérie de N.-D.-des-Victoires se compose des jeunes personnes qui font partie de cette association.

A ces œuvres diverses, exclusivement propres à la paroisse N.-D., nous devons ajouter ici la Société de Saint-Vincent-de-Paul et de l’Ouvroir des pauvres, dont les membres appartiennent aux deux paroisses.

Pour favoriser cet élan religieux et récompenser la générosité et la dévotion des fidèles de la paroisse N.-D., Notre-Saint-Pére le Pape Pie IX, par un bref visé à Soissons, le 25 décembre 1865, a accordé, pour dix ans, aux conditions ordinaires, une indulgence plénière, applicable aux défunts, à tous ceux qui visiteront l’église N.-D. les jours de Noël, de la nativité de la Sainte-Vierge et le 19 mars, en la fête de saint Joseph.

C’était la récompense la plus douce et la plus enviée que put obtenir la piété des fidèles.

Gloire, amour et reconnaissance au grand Pontife de Rome qui a daigné se souvenir de l’humble église N.-D. de Chauny et l’enrichir de grâces spirituelles précieuses !

(1)Il existait avant la Révolution deux confréries très-florissantes : l’une en l’honneur de Saint Nicolas, patrons des mariniers, l’autre en l’honneur des soixante-douze disciples. Cette dernière confrérie, fondée en 1647 dans l’église N.-D., avait été enrichie de nombreuses indulgences par le pape Clément X. Mgr de Baulieu la rétablit en 1806, avec ses anciens privilèges. Le nombre des confrères ne devait pas s’élever à plus de soixante-douze. Aux processions ils portaient de droit le dais et les flambeaux. Chaque année ils remplissaient tous le devoir pascal.

 

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